La prise de décision n’est pas toujours facile ni même garantie en réunion. Pourquoi ? Comment y remédier ? Au micro du podcast SOS Réunions de Bruneau, le réuniologue Louis VAREILLE nous donne ses conseils.
Selon une étude réalisée par Opinionway en 2017, seule une réunion sur quatre aboutit à une prise de décision. Ce n'est pas normal. Avec la génération d'idées, la prise de décision est l'un des deux objectifs principaux qui justifient l'organisation d'une réunion.
Or, il y a une affreuse confusion dans l'esprit de beaucoup entre un sujet de réunion et un objectif de réunion.
Y compris lorsqu'il s'agit de décision.
Voici le type de question qui justifie l'organisation d'une réunion pour décider.
Or très souvent, cet objectif n'est pas clair. Donc pas de décision.
Pour garantir une prise de décision, il faut de la méthode. Une bonne décision est préparée. Il faut être clair sur :
Cela peut sembler évident pourtant… Fréquentes sont les situations où ces règles de bon sens ne sont pas en place.
Pas de préparation.
Pas les bonnes personnes pour décider.
Pas d'anticipation sur le processus nécessaire pour prendre la décision, y compris la prise en compte de la manière dont chaque individu procède pour donner un avis.
Les extravertis parlent avant de penser, alors que les introvertis pensent avant de parler.
Or très souvent, il est demandé aux participants d'exprimer leur opinion, sans leur laisser le temps de la réflexion.
L'extraverti va parler.
L'introverti va se taire.
Donc si vous voulez que tout le monde participe réellement à la décision, donnez leur du temps pour se préparer.
Il faut que tous et toutes contribuent. Il y a beaucoup de manières différentes pour le faire. Parmi elles : le processus de décision par consentement. Issu de la sociocratie, il se fait en plusieurs étapes.
Cela peut paraître un peu lourd mais cela peut nous inspirer, notamment pour distinguer les différentes phases du process collectif : recommandation, présentation, clarification, commentaires, ajustement, puis réponse aux objections, validation, célébration.
Pas besoin d’ouvrir la bouteille de champagne, un simple bravo fait déjà beaucoup ! Et un commentaire sur ce que l'on a pensé du processus.
"Bravo à tous. Je trouve que nous avons une décision qui se tient et qui convient à tous. Merci pour vos contributions. Nous allons pouvoir avancer maintenant."
J'aime bien citer une phrase vue dans Les Echos. Une phrase de Carlos TAVARES, le président du constructeur automobile Stellantis. :
"Quand nous avons une réunion sur un sujet, je tâche de me taire pendant la présentation et de distribuer ensuite la parole. C’est dur mais j’ai appris à me soigner. A la fin, je reformule et je tranche avec ma propre pondération, forcément discutable."
Il y a tout dans cette phrase.
Tout d'abord il y a une recommandation que tout le monde prend le temps d'écouter. Idéalement cette recommandation a été envoyée en amont de la discussion pour que tous ceux qui aiment se préparer puissent le faire.
Puis chacun est sollicité pour commenter et donner son avis.
Et finalement le manager décide sur la base des avis de tous.
C'est ainsi que j'opère lorsque je suis en position de devoir prendre une décision en réunion. Je pousse une recommandation et prends le temps de donner la parole à tous. Je provoque des réactions. Puis je fais la synthèse et confirme la décision.
Cela fonctionne car j'accepte l'idée que ma recommandation soit repoussée et que la discussion qui suive conduise à une solution qui conviennent à tous.
La consultation est souvent collective mais la décision est individuelle. Il y a toujours dans le système une personne qui va porter la responsabilité de la décision, y compris si ce n'est pas la bonne. Le décideur (souvent manager) assume donc la décision.
Soit on annule. Soit on redéfinit l'objectif de la réunion et l'on décide de produire une recommandation qui sera soumise au décideur.
C’est sans doute que les étapes déjà évoquées n’ont pas été suivies.
C’est parfois par manque de courage. L’organisation est totalement embolisée par une incapacité systémique à prendre une décision.
Je vois beaucoup d’erreurs de casting. Des personnes se voient confier des responsabilités qu’elles sont incapables d’assumer, notamment car la prise de décision leur est difficile. Sous couvert d’inclusion, ils ont besoin d’être entourés par la moitié de leur organisation pour décider. Tout le monde n'est pas fait pour trancher.
Il convient de mettre en place des processus non classiques. J’aime bien par exemple le processus de décision à deux tours.
Voire faire appel à des techniques d'analyse de situation comme le EdgeWork.
Une fois la décision prise, il convient de la formaliser et de la communiquer.
Sans oublier de s'assurer que toutes les personnes engagées dans le processus la soutiennent.
Puis la mettre en œuvre, y compris pour corriger rapidement le tir si ce n'était pas la bonne.